Ce que le Danemark peut apprendre à la Suisse

Au niveau de la santé numérique, le système de santé danois est l'un des plus avancés au monde: Le dossier électronique du patient est utilisé dans tout le pays, les patient·e·s ont accès à tout moment à leurs données et l'ordonnance électronique est proposée sur tout le territoire. Un modèle à suivre pour la Suisse?

Julia Biller

03. Octobre 2023

Min Laege est l'application standard du système de santé danois
Min Laege est l'application standard du système de santé danois (source : Minlaege.dk)

Quels enseignements pouvons-nous tirer du Danemark en matière de numérisation des soins de santé? C'est avec cette question en tête que nous nous sommes rendus à Copenhague pour rencontrer les acteurs en coulisses de la Danish Health Data Authority. En effet, l'administration danoise des données de santé garantit la cohérence numérique dans le domaine de la santé. Elle a notamment pour mission de développer et de gérer les registres nationaux de santé, de définir et de maintenir des normes pour l'informatique dans le secteur de la santé et de développer des solutions de santé numériques.  
Ce que j’ai retenu: 
  
1. Un mandat clair pour une infrastructure nationale de base 
Sans une infrastructure de base commune, la communication et l'échange sécurisé de données entre les différents organismes du secteur de la santé représentent un immense défi. Au Danemark, c’est le gouvernement qui est responsable de la mise à disposition de cette infrastructure de base grâce à un financement public. Cela comprend non seulement le dossier électronique du patient, mais aussi d'autres offres comme le dossier de médication commun. Grâce à des normes informatiques uniformes, les systèmes d'information des cabinets médicaux et des cliniques ont pu être consolidés. Le résultat: Aujourd'hui, il ne reste plus que quelques systèmes d'information hospitaliers dans tout le Danemark, contre plus de 60 en Suisse.  

Cela a également facilité l'échange structuré et numérique de données entre les organisations. L'exemple du Danemark montre la force de frappe d'une infrastructure de base déployée au niveau national. Même si le cadre politique diffère en Suisse, notre pays ne profiterait-il pas d'une infrastructure de base centrale comparable au niveau national? 
  
2. Dossier médical partagé: gestion des médicaments à travers les organisations 
Chez Compassana, lorsque nous parlons avec des professionnel·le·s de la santé de solutions numériques dans le système de santé suisse, le thème de la gestion des médicaments est très vite évoqué: Comment pouvons-nous garantir le plus simplement possible que nous disposons de la liste de médicaments la plus récente des patient·e·s à leur entrée à l'hôpital? Et serait-il possible d'associer cette liste de médicaments à des dispositifs de renouvellement rapide et numérique des ordonnances? Ce ne sont là que deux des questions qui font régulièrement l'objet de discussions. À juste titre, car les erreurs de médication sont fréquentes et non seulement dangereuses pour les patient·e·s, mais aussi coûteuses pour le système de santé. 

Avec le dossier médical partagé, le Danemark a résolu ces problèmes. Le dossier pharmaceutique commun permet aux patient·e·s et aux professionnel·le·s de la santé d'accéder aux listes de médicaments. Les professionnel·le·s de la santé peuvent actualiser la liste des médicaments, les patient·e·s peuvent à tout moment consulter les informations relatives aux ordonnances actuelles ou antérieures, ou demander directement le renouvellement d'une ordonnance à leur médecin de famille. Grâce au dossier pharmaceutique commun, la liste des médicaments des patient·e·s reste à jour à tout moment et dans les différents secteurs de soins. Une solution efficace qui permet au Danemark d'éviter les erreurs de médication et de réduire la charge administrative pour les professionnel·le·s de la santé. 

3. Des données à une analyse qualifiée: seulement avec la confiance de la population 
Lors de la visite d'un hôpital de la région de Copenhague, j'ai été surprise par l’excellente base de données. Elle mesure et indique par exemple des indicateurs tels que les temps d'attente pour certaines interventions, dans le temps et en comparaison avec d'autres hôpitaux. Les tableaux de bord et les connaissances sont utilisés pour identifier et mettre en œuvre des améliorations ciblées des processus. Le Danemark a une longue histoire de collecte de données dans le domaine de la santé. Dès les années 1960, des données ont été collectées sur des échantillons biologiques. Le pays met actuellement l'accent sur l'utilisation secondaire des données de santé à des fins de planification et de recherche. 

La condition préalable à cette bonne base de données n'est pas seulement l'infrastructure technique, mais aussi la grande confiance des Danois dans le gouvernement et ses offres numériques. Ce constat s'applique également aux solutions de santé suisses: la protection des données joue un rôle stratégique qui va bien au-delà du simple respect des exigences légales. Pour gagner et conserver la confiance de la population, les solutions de santé suisses devront toujours prouver et démontrer qu'elles sont en mesure de respecter les normes strictes en matière de protection des données. C'est pourquoi ce thème est également prioritaire chez Compassana
 
Ma conclusion 
Le contexte politique danois est différent de celui de la Suisse. Néanmoins, le Danemark a des choses à nous apprendre: lors de la mise en place de l'infrastructure de base, des solutions numériques pour la gestion des médicaments et de l'utilisation des données pour le développement du système dans son ensemble, il est possible de tirer des enseignements qui aideront la Suisse dans sa propre démarche de numérisation. Ma visite a mis en évidence une chose: La Suisse a encore beaucoup de potentiel.